L'expérience et la culture de la guerre au Moyen Âge étudiées à partir de récits biographiques de la noblesse castillane.
À partir des chroniques nobiliaires d'époque trastamare, cette étude cherche à établir comment la guerre était vécue et racontée en Castille au XVe siècle. Les deux premiers chapitres portent sur les conditions de production de ces textes, et abordent les problèmes posés par la mise en récit de l'expérience vécue. Les trois suivants montrent que la culture de guerre est alors largement partagée au sein de la noblesse, sans considération de genre ni de statut : femmes et clercs n'en sont pas exclus. En revanche, le discours sur la guerre construit une forme d'exclusivité nobiliaire qui se manifeste dans le traitement narratif réservé aux combattants roturiers. Le dernier chapitre aborde enfin le combat dans une perspective anthropologique, en s'attachant au corps et aux émotions du guerrier.
Le littéraire et le politique noués sur 40 ans d'histoire cubaine à travers l'évolution d'un groupe de 15 écrivains, depuis leurs débuts dans la revue El caimán barbudo jusqu'à la dissidence, l'exil ou le choix de rester sur l'île, dans les années 1990.
En 1966, sept ans après l'avènement de la révolution cubaine, un nouveau groupe poétique naît autour de la revue El caimán barbudo affiliée au parti communiste de Cuba. Leur écriture est turbulente, originale, alliant adhésion au pouvoir et prise de distance ludique. L'évolution de la liberté d'expression à Cuba, le retentissement national et international de leurs oeuvres, pousseront certains sur le chemin de l'exil et de la dissidence, d'autres à trouver une voie singulière sur l'île. En 1996, une dernière tentative de réunion du groupe à travers les pages de la revue madrilène Encuentro de la cultura cubana redessine encore leurs liens. Croisant études littéraires et sciences sociales, ce livre retrace l'histoire inédite de ce groupe durant la seconde moitié du XXe siècle et analyse la manière dont la littérature se réinvente au gré des bouleversements politiques.
Avant le temps des ministres-favoris de l'époque baroque, les rois de l'Europe médiévale ont compté dans leur proximité sur l'assistance de personnages souvent vus comme leur préfiguration. Appelé « privauté » (privanza), ce phénomène a pour fondement le choix de l'amitié contre la parenté. Ainsi, pour se libérer de ses parents et de ses barons, qui entendent exercer une emprise sur sa royauté, le roi lance ses privados. Néanmoins, si ceux-ci oeuvrent donc à une expulsion, ils organisent dans le même temps une participation alternative et plus large au gouvernement du roi. Dans la Castille de la fin du Moyen Âge, ce phénomène se distingue par une continuité particulièrement propice pour interroger sons sens historique : réalisé sur le terrain idéologique à partir du milieu du XIIIe siècle et devenu stratégique à partir du début du XIVe siècle, le choix de la privauté est à la base d'un régime politique marqué par la distinction entre gouvernement et souveraineté. Cet essai envisage à nouveaux frais ce moment fondateur de l'expérience médiévale du pouvoir d'État.
Au sortir de la guerre civile catalane de 1462-1472, Barcelone, principale cité de Catalogne et grand port méditerranéen, entre dans une phase de reconstruction. Le roi Ferdinand le Catholique transforme les modalités d'entrée au gouvernement municipal, formalise l'accès à la noblesse et implante dans la ville une nouvelle Inquisition sous contrôle royal. Affecté également, le haut clergé cherche sa place, et les chanoines de la cathédrale en particulier tâchent d'assurer leur implantation au sein des pouvoirs urbains en recomposition. Au croisement de l'histoire canoniale et de l'histoire urbaine, cette étude montre comment, au-delà de leurs attributions religieuses, évêques et chanoines, pleinement intégrés à l'élite dirigeante de la ville, sont amenés à jouer un véritable rôle dans la vie publique d'une cité en pleine mutation.
Ce livre examine les fondements historiques et scripturaires de l'idéal de pureté partagé par les juifs et les chrétiens à la fin du Moyen Âge en péninsule Ibérique. Le croisement des sources théoriques et des documents de la pratique, des sources latines, hébraïques et vernaculaires met en évidence la façon dont ce thème majeur de la littérature biblique et talmudique s'est perpétué à travers les siècles et a eu des incidences nombreuses sur la vie quotidienne des hommes au XVe s.
La réflexion débouche sur des questions centrales pour l'histoire de la minorité juive en péninsule Ibérique : le passage de l'antijudaïsme à l'antisémitisme, l'apparition du concept de race, la prépondérance du sang dans l'assignation à une identité, le poids de l'accusation de crime rituel, l'incrimination des non chrétiens dans une société Ibérique de plus en plus exclusive, la discrimination et la ségrégation pour s'en protéger jusqu'à l'expulsion.
L'histoire de l'intendance hispano-américaine ne peut se faire sans l'histoire des hommes qui la gouvernent. Au-delà des données biographiques classiques, cet ouvrage se penche sur leur environnement familial, social et professionnel. Son originalité réside dans la composition du groupe étudié. Il recense l'ensemble des intendants de la vice-royauté de la Nouvelle-Espagne entre 1764 et 1821 quel que soit leur mode de nomination, qu'ils soient entrés ou non en charge. Il est le seul à étudier les intendants de cette aire géographique dans toute son intégralité territoriale (Nouvelle-Espagne, Guatemala, Louisiane, Cuba, Porto Rico, Philippines).
Connecté à la fois à l'Orient, l'Afrique subsaharienne et la Méditerranée, le Maghreb islamique s'insère entre le VII e et le XV e siècle dans des réseaux complexes qui donnent à ses ports un rôle croissant dans les échanges commerciaux, mais aussi plus largement dans la structuration de l'espace. L'analyse des sources arabes et latines permet ainsi de montrer l'évolution des réseaux à différentes échelles, d'abord dans un espace centré sur les pays d'Islam, puis à partir du XIe siècle dans une économie-monde élargie à l'Europe latine. Le pouvoir politique, comme les acteurs économiques, développent alors des stratégies s'adaptant à l'évolution des réseaux à l'échelle mondiale, qui font des ports des pôles et des centres de gravité essentiels de l'espace maghrébin, sur le plan tant politique qu'économique.
Entre 1569 et 1589, l'Espagnol Alonso de Ercilla et le Portugais Jerónimo Corte-Real composèrent une série d'épopées, liées aux Lusiades de Luís de Camões (1572), au fil desquelles émerge un modèle partagé de narration épique dans une étroite relation intertextuelle. D'une part, la comparaison de ces poèmes avec les chroniques révèle une mimésis formelle destinée à autoriser ces récits en vers en adoptant de certains traits de l'histoire en prose. Ainsi, les deux poètes opèrent un rapprochement entre récit d'histoire et récit héroïque qui construit un même regard critique sur les profonds changements qui accompagnent l'expansion territoriale espagnole et portugaise et la réunion des deux couronnes en 1580. D'autre part, en reflétant les mêmes motifs et en se répondant d'un texte à l'autre, Ercilla et Corte- Real forgent sur deux décennies un patron narratif ibérique qui rompt avec le modèle du Roland furieux avant que celui du Tasse ne s'impose dans la péninsule.
La construction du cloître de la cathédrale de Tolède a eu lieu entre les XIVe et XVe siècles. La confrontation de la documentation comptable qu'elle a générée avec le monument lui-même et les signes lapidaires identifiés grâce à l'application des nouvelles technologies, a permis d'approcher la vie quotidienne de l'une des plus grandes entreprises de construction du Moyen Âge castillan et de contribuer à une nouvelle lecture des moyens, des personnes et de l'organisation des ateliers de taille de pierre.
Des portraits. Voilà ce qui vient à l'esprit du spectateur lorsqu'il voit les séries de saintes vierges et martyres de l'atelier de Zurbarán. C'est de cette impression que naît la réflexion conduite ici sur des saintes qui font l'objet d'un culte ancestral. Pour être en mesure de définir l'image de ces figures tant sur le plan de l'histoire locale que sur celui de l'histoire nationale, divers parcours géographiques et de multiples changements d'échelle sont nécessaires. Car ces saintes constituent un ensemble à la fois hétérogène et homogène, une ambivalence que cette étude ne cherche pas à réduire. Partant du principe que le culte est inséparable de l'image, l'ouvrage s'appuie sur des oeuvres écrites et sur des centaines de représentations iconographiques. L'auteur envisage de manière concomitante la mise en scène de ces saintes, leur mise en récit, en mots, en peinture, dans l'Espagne de Philippe III et de Philippe IV.
Ce livre se propose comme une contribution à l'analyse du goût pour l'« oriental » dont témoigne la plupart des sociétés du Bassin méditerranéen au début du Ier millénaire av. J.-C. La démarche s'appuie sur l'établissement du corpus iconographique pour la péninsule Ibérique, thème par thème, et en mettant en avant aussi précisément que possible les ressemblances et les différences entre les images trouvées dans le sol péninsulaire et les « modèles » orientaux. L'exercice de rassemblement, d'ordonnancement et de comparaison iconographique débouche ensuite sur une réflexion consacrée d'une part à l'iconologie et d'autre part à l'échange d'art et de styles dans le cadre des relations entre Orient et Occident méditerranéens, du VIIIe au VIe siècle av. J.-C. Il conduit à une réflexion sur la contribution de la composante indigène au processus de diffusion et de diversification des arts orientalisants, l'innovation procédant tout autant de facteurs internes que d'apports externes. Images hybrides du point de vue thématique, hybrides aussi du point de vue stylistique, ces mélanges constitueront l'essence de l'art ibérique, bien au-delà de cette création d'un Orient d'Extrême Occident.
Le corps du génie militaire espagnol comme apparaît comme un élément moteur un modèle de la des politique militaire du réformiste de la dynastie du redressement militaire et économique du pays, et modèle d'une armée nouvelle par son recrutement fondé sur la compétence scientifique et technique.
La polyvalence de ce corps en un instrument indispensable à la politique de défense de l'Etat, mais aussi à la centralisation monarchique et au despotisme éclairé. Malgré une certaine constance du recrutement d'étrangers, les critères d'hispanité, de noblesse et de formation choisis par le pouvoir affirment la volonté de constituer un corps national d'élite scientifique militaire. Les multiples interventions ingénieurs en font des propagateurs d'une architecture militaire et civile néo-classique, des diffuseurs du savoir scientifique et des créateurs de la notion de territoire national.
L'espace est une notion essentielle autour de laquelle s'organise la complexité d'une oeuvre théâtrale, à la fois texte en action, représentation et genre poétique comme la « comedia ». C'est dans cette perspective qu'est analysée la poétique des espaces naturels, à partir d'un corpus de cinquante-six « comedias »de différents types, depuis Lope de Vega jusqu'au Calderón de la première moitié du XVIIe siècle. Dans le cadre du système spatial codifié de la « comedia », l'analyse typologique des actions en relation avec les espaces naturels permet d'explorer un imaginaire cohérent à travers un ensemble de lieux et de paysages. Selon une dialectique qui va de l'espace scénique du corral à l'espace dramatique, la mer et le « monte » sont, en particulier, l'objet de différentes formes de représentation. Celles-ci dépassent souvent le cadre strictement théâtral, à une époque charnière où l'appréhension de l'espace naturel ouvre de nouvelles perspectives paysagères et iconographiques.